Bien entendu sous réserve de l'évolution de la situation sanitaire actuelle.
samedi 29 août 2020
Calendrier de la saison 2020 / 2021
Le calendrier de la saison 2020 / 2021 est à jour avec les dernières dates connues.
Bien entendu sous réserve de l'évolution de la situation sanitaire actuelle.
Bien entendu sous réserve de l'évolution de la situation sanitaire actuelle.
Gioachino Greco, le maestro de l’échiquier
Par Oliver
Il n’avait pas son pareil pour les pièges et les combinaisons dans les ouvertures. Gioachino Greco (1600-1634, Italie), dit Le Calabrais, apparaît vers la fin de l’âge d’or des échecs italiens. Il est l’un des meilleurs joueurs du XVIIème siècle.
Il n’existe aucun portrait connu de Greco. Ce dessin fantaisiste le représentant a été publié dans « Historia general del ajedrez », Julio Ganzo, Madrid, 1973 (source : chessgames.com).
Parmi les grands noms de l’histoire des échecs, Greco se situe historiquement entre Ruy López (1530-1580, Espagne) et Philidor (1726-1795, France). Il préfigure les grands attaquants de l’école romantique : Anderssen (1818-1879, Allemagne et son « Immortelle » jouée à Londres contre Kieseritzky, joueur du Café de la Régence) ; Morphy (1837-1884, USA et « La partie de l’Opéra » jouée à Paris).
Le traité du noble jeu d'échecs (Trattato del nobilissimo gioco de scacchi), Gioachino Greco, 1619.
Greco est l’un des premiers joueurs à transcrire ses parties. Jusqu’alors, les écrits échiquéens comportaient plutôt des fragments de partie, à partir d’une position donnée. Il offrait des exemplaires de ses manuscrits à ses riches mécènes. (NDLR. – Pour les Alsaciens-Lorrains du club : il offrit un manuscrit de ses parties au duc de Lorraine, lors de son passage à Nancy, en 1621, au cours de son voyage qui le mena d’Italie jusqu’à Londres en 1623, probablement via Paris).
Une page du traité d’échecs de Greco. La notation des coups est descriptive – ici, en l’occurrence : 1.e4 e5. 2.Cf3 Cc6 3.Fc4 Fc5 (une partie italienne).
Les parties de Greco n’indiquent pas le nom de leur adversaire. Ont-elles réellement été jouées ? Peu importe, estime-t-on, puisque Greco était capable de les créer. Ces parties sont remarquablement modernes : la variété des ouvertures figurant dans ses manuscrits est à souligner (Partie italienne, Gambit roi, Partie viennoise, Défense Philidor, Défense sicilienne, Défense Petrov, Défense française, Gambit dame,.. Et même : ouverture Bird !).
Le mat de Greco
Le mat de Greco est une combinaison contre le roque : 1.Cg6+ hxg6 2.Dh3#. (Ce mat figure dans son manuscrit de 1619).
Les parties de Greco sont un classique de la littérature échiquéenne et ont grandement influencé les échecs en Europe. De nos jours encore, elles sont riches d’enseignements pour les amateurs souhaitant progresser.
Piège dans l’ouverture
Défense Philidor
Position après 4.c3. Si les Noirs s’avisent de prendre le pion par 4…Cxe4, ils perdront leur pièce par 5.Da4+ c6 6.Dxe4 1-0
Attaque de mat
Partie italienne
Position après 6…h6. Les Blancs laissent leur cavalier en prise : 7.h4 hxg5 8.hxg5 Ch7 pour obtenir une attaque de mat par 9.Dh5 1-0
Mat à l’étouffée
Partie Italienne
Position après 11.Cf3. Les Noirs réalisent un mat à l’étouffée par 11…Dxf2+ 12.Rh1 Dg1+ 13.Cxg1 Cf2# 0-1. C’est l’un des premiers du genre dans la littérature échiquéenne.
Gambit dame accepté
Gambit dame accepté
Position après 4…c6. Si les Noirs s’entêtent à vouloir garder leur pion par 5. axb5 cxb5 ils perdent une pièce par 6.Df3 ! 1-0.
Gambit roi
Gambit roi, contre-gambit Falkbeer
Position après 7.d4 Fd6. Les Blancs ont été déroqués, mais c’est le roi noir, resté au centre, qui sera maté : 8.Fb5+ Rf8 9. Te1 Df5 10.Te8#. 1-0
Piège à dame
Ouverture Bird : 1.f4
Position après 9.a3. Les Noirs jouent encore un coup de dame : 9…Dxb2. Et les Blancs referment le piège par 10.Ca4. La dame noire est perdue. 1-0.
Pour en savoir plus
Parties de Gioachino Greco (chessgames.com – en anglais)
- https://www.chessgames.com/perl/chessplayer?pid=72111
Pour les collectionneurs fortunés… Une édition française du traité de Greco, publiée à Paris en 1689 « avec privilège du Roy » (NDLR. - autorisation exclusive du roi de publier un ouvrage).
Il n’avait pas son pareil pour les pièges et les combinaisons dans les ouvertures. Gioachino Greco (1600-1634, Italie), dit Le Calabrais, apparaît vers la fin de l’âge d’or des échecs italiens. Il est l’un des meilleurs joueurs du XVIIème siècle.
Parmi les grands noms de l’histoire des échecs, Greco se situe historiquement entre Ruy López (1530-1580, Espagne) et Philidor (1726-1795, France). Il préfigure les grands attaquants de l’école romantique : Anderssen (1818-1879, Allemagne et son « Immortelle » jouée à Londres contre Kieseritzky, joueur du Café de la Régence) ; Morphy (1837-1884, USA et « La partie de l’Opéra » jouée à Paris).
Greco est l’un des premiers joueurs à transcrire ses parties. Jusqu’alors, les écrits échiquéens comportaient plutôt des fragments de partie, à partir d’une position donnée. Il offrait des exemplaires de ses manuscrits à ses riches mécènes. (NDLR. – Pour les Alsaciens-Lorrains du club : il offrit un manuscrit de ses parties au duc de Lorraine, lors de son passage à Nancy, en 1621, au cours de son voyage qui le mena d’Italie jusqu’à Londres en 1623, probablement via Paris).
Les parties de Greco n’indiquent pas le nom de leur adversaire. Ont-elles réellement été jouées ? Peu importe, estime-t-on, puisque Greco était capable de les créer. Ces parties sont remarquablement modernes : la variété des ouvertures figurant dans ses manuscrits est à souligner (Partie italienne, Gambit roi, Partie viennoise, Défense Philidor, Défense sicilienne, Défense Petrov, Défense française, Gambit dame,.. Et même : ouverture Bird !).
Le mat de Greco est une combinaison contre le roque : 1.Cg6+ hxg6 2.Dh3#. (Ce mat figure dans son manuscrit de 1619).
Les parties de Greco sont un classique de la littérature échiquéenne et ont grandement influencé les échecs en Europe. De nos jours encore, elles sont riches d’enseignements pour les amateurs souhaitant progresser.
Piège dans l’ouverture
Position après 4.c3. Si les Noirs s’avisent de prendre le pion par 4…Cxe4, ils perdront leur pièce par 5.Da4+ c6 6.Dxe4 1-0
Attaque de mat
Position après 6…h6. Les Blancs laissent leur cavalier en prise : 7.h4 hxg5 8.hxg5 Ch7 pour obtenir une attaque de mat par 9.Dh5 1-0
Mat à l’étouffée
Position après 11.Cf3. Les Noirs réalisent un mat à l’étouffée par 11…Dxf2+ 12.Rh1 Dg1+ 13.Cxg1 Cf2# 0-1. C’est l’un des premiers du genre dans la littérature échiquéenne.
Gambit dame accepté
Position après 4…c6. Si les Noirs s’entêtent à vouloir garder leur pion par 5. axb5 cxb5 ils perdent une pièce par 6.Df3 ! 1-0.
Gambit roi
Position après 7.d4 Fd6. Les Blancs ont été déroqués, mais c’est le roi noir, resté au centre, qui sera maté : 8.Fb5+ Rf8 9. Te1 Df5 10.Te8#. 1-0
Piège à dame
Position après 9.a3. Les Noirs jouent encore un coup de dame : 9…Dxb2. Et les Blancs referment le piège par 10.Ca4. La dame noire est perdue. 1-0.
Pour en savoir plus
Parties de Gioachino Greco (chessgames.com – en anglais)
- https://www.chessgames.com/perl/chessplayer?pid=72111
mercredi 26 août 2020
C'est bientôt la rentrée
Dans quelques jours je publierai les informations relatives à la rentrée du Cavalier de la Tourelle.
Rentrée qui se fera dans un contexte un peu particulier compte tenu des circonstances actuelles.
En attendant, vous pouvez réviser et jouer aux échecs de plusieurs façons
* Avec les cahiers de la FFE
* Avec nos cours pour enfants et pour adultes
* Et en jouant des parties sur internet via le site Lichess
A très bientôt !
Rentrée qui se fera dans un contexte un peu particulier compte tenu des circonstances actuelles.
Quelques exercices d'échecs à la plage :-)
En attendant, vous pouvez réviser et jouer aux échecs de plusieurs façons
* Avec les cahiers de la FFE
* Avec nos cours pour enfants et pour adultes
* Et en jouant des parties sur internet via le site Lichess
A très bientôt !
mardi 25 août 2020
Souvenir kitsch de Luxembourg-Ville
Par Oliver
Une boutique de souvenirs, rue de la Reine, juste en face du palais ducal, à Luxembourg-Ville (capitale du Grand-Duché).
Rue de la Reine, Luxembourg
Parmi tous les bibelots exposés dans la boutique, un objet particulièrement kitsch attire notre attention : des figurines représentant un couple de petits vieux en train de jouer aux échecs.
Plusieurs exemplaires disponibles : on peut en acheter deux couples, pour faire des blitz à quatre. Prix : 7,95 euros.
"Le kitsch, c’est la station de correspondance entre l’être et l’oubli",
Milan Kundera
Une figurine représentant un couple en train de jouer aux échecs
Pas évident d’identifier les pièces placées sur l’échiquier (une finale de pions ou de pièces lourdes, peut-être ?). Mais l’échiquier a bel et bien 64 cases, et il est correctement orienté, avec la case h1 de couleur blanche - c'est déjà ca ! .
Vitrine de la boutique de souvenirs, rue de la Reine, à Luxembourg-Ville.
Ne souhaitant pas déranger davantage ces petits joueurs d’échecs, nous les avons laissés à leur partie, dans la boutique de souvenirs… Et nous nous sommes dits que passer ses vieux jours à jouer aux échecs avec la personne que l’on aime est une bien agréable occupation.
Une boutique de souvenirs, rue de la Reine, juste en face du palais ducal, à Luxembourg-Ville (capitale du Grand-Duché).
Parmi tous les bibelots exposés dans la boutique, un objet particulièrement kitsch attire notre attention : des figurines représentant un couple de petits vieux en train de jouer aux échecs.
"Le kitsch, c’est la station de correspondance entre l’être et l’oubli",
Milan Kundera
Pas évident d’identifier les pièces placées sur l’échiquier (une finale de pions ou de pièces lourdes, peut-être ?). Mais l’échiquier a bel et bien 64 cases, et il est correctement orienté, avec la case h1 de couleur blanche - c'est déjà ca ! .
Ne souhaitant pas déranger davantage ces petits joueurs d’échecs, nous les avons laissés à leur partie, dans la boutique de souvenirs… Et nous nous sommes dits que passer ses vieux jours à jouer aux échecs avec la personne que l’on aime est une bien agréable occupation.
samedi 22 août 2020
Marcel Duchamp, un artiste du jeu d’échecs
Par Oliver
"Si tous les artistes ne sont pas des joueurs d’échecs, tous les joueurs d’échecs sont des artistes". Marcel Duchamp (1887-1968) est un artiste majeur du XXème siècle, notamment associé au dadaïsme et au surréalisme. Peintre, plasticien, homme de lettres…
Il est notamment l’inventeur du "ready-made" : un objet manufacturé qu’un artiste détourne de son usage originel pour en faire une œuvre d’art. (Ex. : "Fontaine" et "La Roue de bicyclette").
Marcel Duchamp, qu’André Breton (1896-1966, père du Surréalisme) qualifiait d'«homme le plus intelligent du siècle» était un excellent joueur d’échecs (champion de Haute-Normandie 1924, plusieurs participations aux championnats de France et aux Olympiades d’échecs avec l’équipe de France).
On a dit du style de Duchamp qu’il était influencé par Capablanca (3ème champion du monde, 1921-27) qui excellait notamment dans les finales, mais aussi par l’école hypermoderne des échecs. Examinons cela sur les 64 cases de l’échiquier.
Marcel Duchamp : artiste et joueurs d’échecs
Georges Koltanowski, 1903-2000, Belgique-USA. Président de la fédération US des échecs 1975-78, arbitre international. Recordman du monde de parties simultanées jouées à l’aveugle. Clou du spectacle : après les parties simultanées jouées à l’aveugle, il en récitait les coups joués, pour l’ensemble des parties.
Koltanowski-Duchamp, 1929
Koltanowski-Duchamp, 1929.
Position après 13.Dd2.
Les Noirs font jouer la tactique pour conclure la partie en 15 coups seulement : 13…Cxd5 14.Cxd7 Cxf4 15.Nxf8 Fd4+ 0-1.
Un livre sur l’amitié échiquéenne qui liait Duchamp et Koltanowski, deux Européens ayant émigré aux USA… "Duchamp's Pipe. A chess romance - Marcel Duchamp and George Koltanowski", Celia Rabinovitch, North Atlantic Books, 2020
Olympiades d’échecs de 1928 : une cuisante défaite
Marcel Duchamp participa plusieurs fois aux Olympiades d’échecs avec l’équipe de France (La Haye, 1928 ; Hambourg, 1930 ; Prague, 1931 ; Folkestone, 1933). Lors de l’édition de 1928 à La Haye (Pays-Bas), la France rencontre l’Autriche lors de la 16ème ronde. A cette occasion, Hans Mueller remporte contre Duchamp la partie la plus courte de cette édition des Olympiades (une miniature en 10 coups).
H.Mueller 1-0 M.Duchamp, 1928.
Position après 7.Fh4.
Pensant pouvoir piéger leur adversaire dans l’ouverture, les Noirs jouent 7…Ce4. Malheureusement, les Blancs ont mieux calculé les différentes variantes : 8.Fxd8 Cxc3 9.Cxc6 Cxd1 10.Cxb4 1-0
Le Surréalisme au cinéma : "Entracte", film de René Clair (1924), avec (entre autres) Marcel Duchamp et Man Ray – ici en train de jouer aux échecs sur le toit du théâtre des Champs-Elysées.
"Le jeu d'échecs est l'école du silence",
Marcel Duchamp
Affiche du championnat de France d’échecs de 1925 à Nice, conçue par Marcel Duchamp.
Il termina 6ème cette compétition. Après un bon début de tournoi, il gaffa dans une position supérieure contre Robert Crépeaux (champion en titre : Strasbourg, 1924) qui remporta également cette édition de 1925.
Marcel Duchamp 0-1 Robert Crépeaux, 1925.
Les Blancs gaffent par 30.Tc1?? Pointe tactique des Noirs : 30… Dxe4! La partie se termina quelques coups plus tard : 31. Dc7+ Re8 32. Db8+ Rf7 33. Dc7+ Rg6 34. f3 Cf2+ 35. Rg1 De3 36. Dc2+ Cd3+ 0-1. Les chances pour Marcel Duchamp de remporter le championnat de France s’envolent.
Le problème d’échecs sans solution
A l’occasion d’une expo ("Through the Big End of the Opera Glass", 1943 – Marcel Duchamp, Yves Tanguy, Joseph Cornell) dans la galerie d’art new-yorkaise de Julien Levy, Duchamp -chargé d’en concevoir l’invitation-, y inclut un problème d’échecs dans sa création. (On y note la présence d’un Cupidon visant de sa flèche la colonne « b »). Mais il n’en révéla jamais la solution…
Les Blancs jouent et gagnent. Marcel Duchamp, 1943.
Le GMI américain Larry Evans, qui fut l’ami de Duchamp, propose une solution commençant par 1.Re4!, mais il aurait négligé certaines ressources défensives des Noirs…
"L'opposition et les cases conjuguées sont réconciliées", Vitaly Halberstadt et Marcel Duchamp. Bruxelles, Edm. Lancel, 1932 (traité sur les finales avec pions seuls - cf. position de Lasker-Reichhelm).
Les échecs, une beauté proche de celle de la poésie
"Objectivement, une partie d’échecs ressemble beaucoup à un dessin à la plume, avec cette différence que le joueur d’échecs peint avec les formes blanches et noires déjà prêtes [NDLR : allusion à l’art "ready made"], au lieu d’inventer des formes comme le fait l’artiste.
Le dessin ainsi élaboré sur l’échiquier n’a apparemment pas de valeur esthétique visuelle, et ressemble davantage à une partition de musique, qui peut être jouée et rejouée.
Dans les échecs la beauté n’est pas une expérience visuelle comme en peinture. C’est une beauté plus proche de celle qu’offre la poésie ; les pièces d’échecs sont l’alphabet majuscule qui donne forme aux pensées ; et ces pensées, bien qu’elles composent un dessin visuel sur l’échiquier, expriment leur beauté, comme un poème.
En fait, je crois que tout joueur d’échecs connaît deux plaisirs esthétiques mélangés : l’image abstraite apparentée à l’écriture, et le plaisir sensuel de l’exécution idéographique de cette image sur l’échiquier. Mes contacts étroits avec les artistes et les joueurs d’échecs m’ont induit à conclure que, si tous les artistes ne sont pas des joueurs d’échecs, tous les joueurs d’échecs sont des artistes".
Marcel Duchamp (allocution lors du banquet de l'association des échecs de New-York, 1952
Pièces d’échecs en bois, style Art déco, sculptées par Marcel Duchamp lors d’un séjour à Buenos Aires, Argentine, 1918-1919 (aidé par un artisan local pour les cavaliers, plus difficiles à réaliser.
Selon une rumeur tenace, la première épouse de Marcel Duchamp, lasse qu’il la délaisse au profit de sa passion des échecs, aurait un jour collé les pièces de son jeu au plateau, pour se venger de sa rivale, Caïssa.
Marcel Duchamp dirigeant une partie d’échecs vivante, 1956 : des acteurs jouant le rôle des pièces
"Si tous les artistes ne sont pas des joueurs d’échecs, tous les joueurs d’échecs sont des artistes". Marcel Duchamp (1887-1968) est un artiste majeur du XXème siècle, notamment associé au dadaïsme et au surréalisme. Peintre, plasticien, homme de lettres…
Il est notamment l’inventeur du "ready-made" : un objet manufacturé qu’un artiste détourne de son usage originel pour en faire une œuvre d’art. (Ex. : "Fontaine" et "La Roue de bicyclette").
Marcel Duchamp, qu’André Breton (1896-1966, père du Surréalisme) qualifiait d'«homme le plus intelligent du siècle» était un excellent joueur d’échecs (champion de Haute-Normandie 1924, plusieurs participations aux championnats de France et aux Olympiades d’échecs avec l’équipe de France).
On a dit du style de Duchamp qu’il était influencé par Capablanca (3ème champion du monde, 1921-27) qui excellait notamment dans les finales, mais aussi par l’école hypermoderne des échecs. Examinons cela sur les 64 cases de l’échiquier.
Koltanowski-Duchamp, 1929
Position après 13.Dd2.
Les Noirs font jouer la tactique pour conclure la partie en 15 coups seulement : 13…Cxd5 14.Cxd7 Cxf4 15.Nxf8 Fd4+ 0-1.
Olympiades d’échecs de 1928 : une cuisante défaite
Marcel Duchamp participa plusieurs fois aux Olympiades d’échecs avec l’équipe de France (La Haye, 1928 ; Hambourg, 1930 ; Prague, 1931 ; Folkestone, 1933). Lors de l’édition de 1928 à La Haye (Pays-Bas), la France rencontre l’Autriche lors de la 16ème ronde. A cette occasion, Hans Mueller remporte contre Duchamp la partie la plus courte de cette édition des Olympiades (une miniature en 10 coups).
Position après 7.Fh4.
Pensant pouvoir piéger leur adversaire dans l’ouverture, les Noirs jouent 7…Ce4. Malheureusement, les Blancs ont mieux calculé les différentes variantes : 8.Fxd8 Cxc3 9.Cxc6 Cxd1 10.Cxb4 1-0
"Le jeu d'échecs est l'école du silence",
Marcel Duchamp
Il termina 6ème cette compétition. Après un bon début de tournoi, il gaffa dans une position supérieure contre Robert Crépeaux (champion en titre : Strasbourg, 1924) qui remporta également cette édition de 1925.
Les Blancs gaffent par 30.Tc1?? Pointe tactique des Noirs : 30… Dxe4! La partie se termina quelques coups plus tard : 31. Dc7+ Re8 32. Db8+ Rf7 33. Dc7+ Rg6 34. f3 Cf2+ 35. Rg1 De3 36. Dc2+ Cd3+ 0-1. Les chances pour Marcel Duchamp de remporter le championnat de France s’envolent.
Le problème d’échecs sans solution
A l’occasion d’une expo ("Through the Big End of the Opera Glass", 1943 – Marcel Duchamp, Yves Tanguy, Joseph Cornell) dans la galerie d’art new-yorkaise de Julien Levy, Duchamp -chargé d’en concevoir l’invitation-, y inclut un problème d’échecs dans sa création. (On y note la présence d’un Cupidon visant de sa flèche la colonne « b »). Mais il n’en révéla jamais la solution…
Le GMI américain Larry Evans, qui fut l’ami de Duchamp, propose une solution commençant par 1.Re4!, mais il aurait négligé certaines ressources défensives des Noirs…
Les échecs, une beauté proche de celle de la poésie
"Objectivement, une partie d’échecs ressemble beaucoup à un dessin à la plume, avec cette différence que le joueur d’échecs peint avec les formes blanches et noires déjà prêtes [NDLR : allusion à l’art "ready made"], au lieu d’inventer des formes comme le fait l’artiste.
Le dessin ainsi élaboré sur l’échiquier n’a apparemment pas de valeur esthétique visuelle, et ressemble davantage à une partition de musique, qui peut être jouée et rejouée.
Dans les échecs la beauté n’est pas une expérience visuelle comme en peinture. C’est une beauté plus proche de celle qu’offre la poésie ; les pièces d’échecs sont l’alphabet majuscule qui donne forme aux pensées ; et ces pensées, bien qu’elles composent un dessin visuel sur l’échiquier, expriment leur beauté, comme un poème.
En fait, je crois que tout joueur d’échecs connaît deux plaisirs esthétiques mélangés : l’image abstraite apparentée à l’écriture, et le plaisir sensuel de l’exécution idéographique de cette image sur l’échiquier. Mes contacts étroits avec les artistes et les joueurs d’échecs m’ont induit à conclure que, si tous les artistes ne sont pas des joueurs d’échecs, tous les joueurs d’échecs sont des artistes".
Marcel Duchamp (allocution lors du banquet de l'association des échecs de New-York, 1952
Selon une rumeur tenace, la première épouse de Marcel Duchamp, lasse qu’il la délaisse au profit de sa passion des échecs, aurait un jour collé les pièces de son jeu au plateau, pour se venger de sa rivale, Caïssa.
jeudi 20 août 2020
Vera Menchik, une pionnière des échecs féminins
Attention messieurs ! Une défaite contre elle, et vous voilà membres du « Club Menchik ».
Max Euwe (5ème champion du monde, 1935-37), Samuel Reshevsky (8 fois champion des USA), Mir Sultan Khan (champion du Royaume-Uni 1929, 1932 & 1933) font partie des joueurs masculins renommés que Vera Menchik a battus. Fred Lazard, célèbre joueur et problémiste du Café de la Régence, à Paris, est également membre du « Club Menchik ».
Vera Menchik, 1906-1944, première championne du monde d’échecs.
Vera Menchik fut championne du monde de 1927 à 1944, lorsqu’elle périt chez elle à Londres, lors d’un bombardement aérien allemand.
Elle est née en 1906, à Moscou, de parents anglo-tchèques. Elle apprend à jouer aux échecs à l’âge de 9 ans. En 1921, sa famille s’installe en Angleterre. Comme elle ne parle que le russe, elle hésite à s’inscrire dans un club d’échecs. Finalement, en 1923, elle s’inscrit au club de Hastings (ville de tradition échiquéenne), où elle réside. Elle commence alors à prendre des cours avec John Drewitt (plusieurs fois champion de Londres), puis avec le maître hongrois Geza Maroczy (qui fut également le coach de Max Euwe).
Vera Menchik a gagné des parties contre bon nombre d’adversaires masculins de premier plan.
Elle a remporté le 1er championnat du monde féminin organisé par la FIDE en 1927 (en marge des Olympiades d’échecs masculines). Elle défendit avec succès son titre six fois, avec un score global impressionnant (+78 =4 -1). La coupe Vera-Menchik récompense l'équipe gagnante des olympiades d'échecs féminines.
Timbre de la République tchèque (dont son père était originaire) en l’honneur de V.Menchik.
C’est paraît-il, en 1929, lors du tournoi de Karlsbad (République tchèque), que le « Club Menchik » fut inauguré. L’un des participants, Albert Becker, maître d’échecs autrichien, aurait ironisé sur la présence d’une femme dans le tournoi. Les femmes n’ayant pas le niveau pour jouer en compétition -selon lui-, ceux qui perdraient contre elle rejoindraient ce « club ». Ironie du sort, il en devint membre, dès la 3ème ronde de ce même tournoi de Karlsbad…
Voici donc un petit florilège des victoires de Vera Menchik contre ces messieurs.
Pour en savoir plus
Parties de Vera Menchik (chessgames.com - en anglais)
https://www.chessgames.com/perl/chessplayer?pid=13277
Une biographie de Vera Menchik, 1ère championne du monde d’échecs.
Max Euwe (5ème champion du monde, 1935-37), Samuel Reshevsky (8 fois champion des USA), Mir Sultan Khan (champion du Royaume-Uni 1929, 1932 & 1933) font partie des joueurs masculins renommés que Vera Menchik a battus. Fred Lazard, célèbre joueur et problémiste du Café de la Régence, à Paris, est également membre du « Club Menchik ».
Vera Menchik fut championne du monde de 1927 à 1944, lorsqu’elle périt chez elle à Londres, lors d’un bombardement aérien allemand.
Elle est née en 1906, à Moscou, de parents anglo-tchèques. Elle apprend à jouer aux échecs à l’âge de 9 ans. En 1921, sa famille s’installe en Angleterre. Comme elle ne parle que le russe, elle hésite à s’inscrire dans un club d’échecs. Finalement, en 1923, elle s’inscrit au club de Hastings (ville de tradition échiquéenne), où elle réside. Elle commence alors à prendre des cours avec John Drewitt (plusieurs fois champion de Londres), puis avec le maître hongrois Geza Maroczy (qui fut également le coach de Max Euwe).
Elle a remporté le 1er championnat du monde féminin organisé par la FIDE en 1927 (en marge des Olympiades d’échecs masculines). Elle défendit avec succès son titre six fois, avec un score global impressionnant (+78 =4 -1). La coupe Vera-Menchik récompense l'équipe gagnante des olympiades d'échecs féminines.
C’est paraît-il, en 1929, lors du tournoi de Karlsbad (République tchèque), que le « Club Menchik » fut inauguré. L’un des participants, Albert Becker, maître d’échecs autrichien, aurait ironisé sur la présence d’une femme dans le tournoi. Les femmes n’ayant pas le niveau pour jouer en compétition -selon lui-, ceux qui perdraient contre elle rejoindraient ce « club ». Ironie du sort, il en devint membre, dès la 3ème ronde de ce même tournoi de Karlsbad…
Voici donc un petit florilège des victoires de Vera Menchik contre ces messieurs.
Pour en savoir plus
Parties de Vera Menchik (chessgames.com - en anglais)
https://www.chessgames.com/perl/chessplayer?pid=13277
dimanche 16 août 2020
« Un mat splendide » de Richard Réti
Par Oliver
C’est le chef d’œuvre de Richard Réti.
La position finale, appelée « mat de Réti » est répertoriée parmi les schémas de mat les plus célèbres : le mat d’Anastasie, le mat de Legal, le mat de Morphy (partie de l’Opéra de Paris), le mat de Philidor (mat à l’étouffée),…
Zoom sur la partie Richard Réti 1-0 Xavier Tartakower, jouée à Vienne (Autriche-Hongrie), en 1910 (Défense Caro-Kann – B15).
Richard Réti (1889-1929, Autriche-Hongrie, Tchécoslovaquie).
Il est l’un des fondateurs de l’école hypermoderne des échecs (avec Breyer, Nimzowitsch, Tartakower,…). Réti était également un compositeur d’études et de problèmes d’échecs.
"Les grosses bourdes sont là, sur l'échiquier, attendant d'être commises."
Xavier Tartakower
Une miniature en 11 coups...
Réti-Tartakower, 1910.
Position après 8.O-O-O. Les Blancs laissent leur Ce4 en prise. Les Noirs, qui ont pourtant négligé leur développement, acceptent le cadeau empoisonné : 8…Cxe4. Le piège des Blancs se déclenche : 9. Dd8+ (sacrifice de dame) 9…Rxd8 10. Fg5+ (double échec : seule la fuite du roi est possible) 10…Rc7 11. Fd8# 1-0
Position après 11.Fd8# : c’est le « mat de Réti ».
Xavier Tartakower a inclus cette partie (sous le titre "Un mat splendide") dans son Bréviaire des Échecs.
Xavier Tartakover (1887-1956, Russie, Autriche-Hongrie, Pologne, France). L’un des 27 premiers grands maîtres internationaux (GMI) titrés par la FIDE en 1950.
"La tactique consiste à savoir ce qu'il faut faire quand il y a quelque chose à faire. La stratégie consiste à savoir ce qu'il faut faire quand il n'y a rien à faire."
Xavier Tartakower
Xavier Tartakower, un joueur du Café de la Régence, à Paris.
Article du blog « Le Café de la Régence », publié par Jean Olivier Leconte, président du Cavalier de la Tourelle de St-Mandé.
- http://lecafedelaregence.blogspot.com/2016/05/xavier-tartakover.html
Bréviaire des Échecs, Xavier Tartakower, 1937 : un classique du genre, pour les joueurs débutants.
C’est le chef d’œuvre de Richard Réti.
La position finale, appelée « mat de Réti » est répertoriée parmi les schémas de mat les plus célèbres : le mat d’Anastasie, le mat de Legal, le mat de Morphy (partie de l’Opéra de Paris), le mat de Philidor (mat à l’étouffée),…
Zoom sur la partie Richard Réti 1-0 Xavier Tartakower, jouée à Vienne (Autriche-Hongrie), en 1910 (Défense Caro-Kann – B15).
Il est l’un des fondateurs de l’école hypermoderne des échecs (avec Breyer, Nimzowitsch, Tartakower,…). Réti était également un compositeur d’études et de problèmes d’échecs.
"Les grosses bourdes sont là, sur l'échiquier, attendant d'être commises."
Xavier Tartakower
Une miniature en 11 coups...
Position après 8.O-O-O. Les Blancs laissent leur Ce4 en prise. Les Noirs, qui ont pourtant négligé leur développement, acceptent le cadeau empoisonné : 8…Cxe4. Le piège des Blancs se déclenche : 9. Dd8+ (sacrifice de dame) 9…Rxd8 10. Fg5+ (double échec : seule la fuite du roi est possible) 10…Rc7 11. Fd8# 1-0
Xavier Tartakower a inclus cette partie (sous le titre "Un mat splendide") dans son Bréviaire des Échecs.
"La tactique consiste à savoir ce qu'il faut faire quand il y a quelque chose à faire. La stratégie consiste à savoir ce qu'il faut faire quand il n'y a rien à faire."
Xavier Tartakower
Xavier Tartakower, un joueur du Café de la Régence, à Paris.
Article du blog « Le Café de la Régence », publié par Jean Olivier Leconte, président du Cavalier de la Tourelle de St-Mandé.
- http://lecafedelaregence.blogspot.com/2016/05/xavier-tartakover.html
Bréviaire des Échecs, Xavier Tartakower, 1937 : un classique du genre, pour les joueurs débutants.
vendredi 14 août 2020
Un peu de nostalgie - Bulletin numéro 46
Bulletin numéro 46 - Juin 2010
Au sommaire
* Championnat de France des jeunes à Troyes
* Catégorie Minime : James Eden et Jules Brunier
* Catégorie Benjamin : Victoria Likhoded et Charles Dumas
* Catégorie Pupille : Julie Fraval, Adrien Rodriguez et Gaëtan Roque
* Open A : Etienne Albaric
* Top Jeunes : Saint-Mandé se maintient
* Quizz sur 5 champions du Monde d'échecs
Au sommaire
* Championnat de France des jeunes à Troyes
* Catégorie Minime : James Eden et Jules Brunier
* Catégorie Benjamin : Victoria Likhoded et Charles Dumas
* Catégorie Pupille : Julie Fraval, Adrien Rodriguez et Gaëtan Roque
* Open A : Etienne Albaric
* Top Jeunes : Saint-Mandé se maintient
* Quizz sur 5 champions du Monde d'échecs
mercredi 12 août 2020
Staunton et le tournoi de Londres (1851)
Par Oliver
A l’occasion de l’Exposition universelle de Londres de 1851, un groupe de joueurs européens (Bledow, von der Lasa, Kennedy et Staunton) eut l’idée d’organiser un tournoi international pour y promouvoir le jeu d’échecs, et dont le vainqueur serait déclaré champion du monde.
Ce tournoi (à élimination directe) contribua notamment à définir des questions fondamentales d’arbitrage : les contrôles réguliers du temps, la notation des coups et les règles du jeu en compétition d’échecs.
L’exposition universelle de 1851, à Londres : vue de l’intérieur du Crystal Palace, à Hyde Park.
Seize joueurs(*) participèrent à ce tournoi qui fut remporté par Anderssen devant Wyvill. Dans le match pour la 3ème place, Staunton s’inclina de peu devant Elijah Williams. Une déception pour Staunton considéré comme le meilleur joueur du monde depuis sa victoire sur Saint-Amant en 1843 à Paris, et qui comptait bien remporter « son tournoi ».
Staunton perdit 4-1 en demi-finale, face à Anderssen, le futur vainqueur du tournoi (dont il avait sans doute sous-estimé la force). Staunton remporta tout de même contre ce dernier une belle partie avec les Blancs (Partie italienne, 30 coups) conclue par un mat.
(*) Royaume-Uni : Howard Staunton, Marmaduke Wyvill, Elijah Williams, Henry Bird, Hugh Alexander Kennedy, Edward Löwe, E. S. Kennedy, James Mucklow, Samuel Newham et Alfred Brodie ; Allemagne : Adolf Anderssen, Bernhard Horwitz et Carl Mayet ; Hongrie : Johann Löwenthal (exilé aux USA) et József Szén ; France : Lionel Kieseritzky.
(NDLR : Plusieurs autres grands joueurs de l’époque, invités, ne purent pas se rendre à Londres : von der Lasa, Petrov, Jaenish,… Quant à Saint-Amant il se trouvait alors en Californie).
Howard Staunton
Howard Staunton (1810-1864, Angleterre) est considéré comme le meilleur joueur d’échecs du monde durant la période 1843-1851.
Ses articles et ses livres (ex. : The Chess-Player's Handbook, 1847) ont grandement contribué au développement des échecs. (NDLR. - En plus des échecs, Staunton était un spécialiste de Shakespeare).
On lui doit l’ouverture anglaise (1.c4) et le gambit Staunton dans la défense hollandaise (1.d4 f5 2.e4!?). Sa maîtrise du jeu positionnel en fait pour certains le père des échecs modernes (d’autres citent plutôt Steinitz, premier champion du monde officiel des échecs : 1886-1894).
Staunton est également sujet à controverse : certains le soupçonnent de stratégie d’évitement pour ne pas affronter Paul Morphy, jeune prodige de La Nouvelle-Orléans, USA (dont la mère était française), coqueluche du Café de la Régence à Paris (là où Staunton avait détrôné Saint-Amant en 1843).
Adolf Anderssen
Adolf Anderssen, 1818-1879, Allemagne. Professeur de mathématiques de profession, joueur d’échecs par passion, Anderssen était un joueur d’échecs de l’école romantique, où l’attaque prime sur le matériel (Paul Morphy est un autre illustre représentant de cette école, "fondée" par l’Italien Greco).
Il est considéré comme étant le meilleur joueur du monde de 1851 à 1858. Anderssen dit avoir appris à jouer aux échecs grâce au livre de William Lewis, Fifty Games between Labourdonnais and McDonnell (1835), que lui avait offert son père.
Il fut également un problémiste reconnu, publiant dès 1842, Aufgaben für Schachspieler, une collection de 60 problèmes. Ce qui attira sur lui l’attention de la Pléiade berlinoise, nom donné à un groupe de sept champions d'échecs constitué à Berlin au milieu du XIXème siècle. (On leur doit notamment la défense berlinoise dans la partie espagnole).]
Diagramme – Staunton-Anderssen
Staunton-Anderssen, ronde 3, Londres 1851. Position après 28…h5.
Les Blancs jouent 29.Cf6+ et les Noirs, ne voyant pas la menace de mat, jouent 29…Rf7.
Les Blancs concluent par : 30.De8# 1-0.
The Chess Tournament, livre rédigé par Staunton sur le tournoi de Londres de 1851, dont il était l’organisateur et l’un des 16 participants.
Le tournoi de Londres (1851)
Résultats – tournoi de Londres, 1851 (Source : Wikipédia).
Parties et résultats complets (en anglais)
https://www.chessgames.com/perl/chess.pl?tid=79453
Le jeu d’échecs Staunton
Pièces d’échecs – modèle Staunton
En 1849, Nathaniel Cooke (rédacteur en chef, The Illustrated London News) déposa un brevet pour le design de pièces d’échecs qu’il avait dessinées. Elles étaient compactes, bien équilibrées, et facilement identifiables. Howard Staunton en fit la promotion dans sa chronique dans le même journal (chronique d’échecs la plus lue au monde, à l’époque).
Les 500 premiers jeux (ébène et buis, ivoire) furent vendus dans un coffret signé par Staunton, contenant également un exemplaire de son traité d’échecs, The Chess-Player's Handbook.
Le modèle Staunton s’imposa rapidement dans le monde entier. Son design « néo-classique » victorien est inspiré de l’architecture de la Grèce Antique et de l’Empire romain - ex : forme des cavaliers inspiré par les chevaux du Parthénon (NDLR. - Les modèles antérieurs les plus courants -Barleycorn, Régence, St-George, modèle d’Europe centrale- étaient généralement de forme haute et étroite, se renversaient facilement au cours des parties. Leurs pièces se ressemblaient toutes, ce qui désavantageait un joueur peu familier du modèle utilisé par son adversaire).
Apprécié des amateurs comme des professionnels, le jeu d’échecs Staunton est le modèle recommandé par la FIDE pour les compétitions officielles d’échecs.
Pour en savoir plus : article – matériel du match S-Amant vs Staunton, Paris (blog : café de la régence – J.-O. Leconte)
La partie immortelle d’Anderssen
Si Saint-Amant fut absent du tournoi de Londres, un autre joueur du Café de la Régence, à Paris, était présent : Lionel Kieseritzky (éliminé lors de la première ronde par…Anderssen).
Lors d’une partie, en marge du tournoi qu’il venait de remporter, Anderssen, joueur romantique par excellence (NDLR. - l’attaque prime sur les considérations positionnelles – nous sommes à l’aube des échecs modernes), joua une partie remarquable contre Kieseritzky. C’est « La partie immortelle ».
Anderssen-Kieseritzky, Londres 1851.
Position finale après 23.Fe7#. Les Blancs ont sacrifié leur dame et leurs deux tours, pour mater les Noirs avec trois pièces mineures.
Pour en savoir plus : article – Kieseritzky (blog : café de la régence – J.-O.Leconte)
Un problème d’échecs d’Anderssen
Les Blancs jouent et font mat en 4 coups.
A.Anderssen, Aufgaben für Schachspieler (Gourmandises pour joueur d'échecs), 1842.
Solution : 1.Fh5 Rxh5 2.Rg7 h6 3.Rf6 Rh4 4.Rg6#
A l’occasion de l’Exposition universelle de Londres de 1851, un groupe de joueurs européens (Bledow, von der Lasa, Kennedy et Staunton) eut l’idée d’organiser un tournoi international pour y promouvoir le jeu d’échecs, et dont le vainqueur serait déclaré champion du monde.
Ce tournoi (à élimination directe) contribua notamment à définir des questions fondamentales d’arbitrage : les contrôles réguliers du temps, la notation des coups et les règles du jeu en compétition d’échecs.
Seize joueurs(*) participèrent à ce tournoi qui fut remporté par Anderssen devant Wyvill. Dans le match pour la 3ème place, Staunton s’inclina de peu devant Elijah Williams. Une déception pour Staunton considéré comme le meilleur joueur du monde depuis sa victoire sur Saint-Amant en 1843 à Paris, et qui comptait bien remporter « son tournoi ».
Staunton perdit 4-1 en demi-finale, face à Anderssen, le futur vainqueur du tournoi (dont il avait sans doute sous-estimé la force). Staunton remporta tout de même contre ce dernier une belle partie avec les Blancs (Partie italienne, 30 coups) conclue par un mat.
(*) Royaume-Uni : Howard Staunton, Marmaduke Wyvill, Elijah Williams, Henry Bird, Hugh Alexander Kennedy, Edward Löwe, E. S. Kennedy, James Mucklow, Samuel Newham et Alfred Brodie ; Allemagne : Adolf Anderssen, Bernhard Horwitz et Carl Mayet ; Hongrie : Johann Löwenthal (exilé aux USA) et József Szén ; France : Lionel Kieseritzky.
(NDLR : Plusieurs autres grands joueurs de l’époque, invités, ne purent pas se rendre à Londres : von der Lasa, Petrov, Jaenish,… Quant à Saint-Amant il se trouvait alors en Californie).
Howard Staunton (1810-1864, Angleterre) est considéré comme le meilleur joueur d’échecs du monde durant la période 1843-1851.
Ses articles et ses livres (ex. : The Chess-Player's Handbook, 1847) ont grandement contribué au développement des échecs. (NDLR. - En plus des échecs, Staunton était un spécialiste de Shakespeare).
On lui doit l’ouverture anglaise (1.c4) et le gambit Staunton dans la défense hollandaise (1.d4 f5 2.e4!?). Sa maîtrise du jeu positionnel en fait pour certains le père des échecs modernes (d’autres citent plutôt Steinitz, premier champion du monde officiel des échecs : 1886-1894).
Staunton est également sujet à controverse : certains le soupçonnent de stratégie d’évitement pour ne pas affronter Paul Morphy, jeune prodige de La Nouvelle-Orléans, USA (dont la mère était française), coqueluche du Café de la Régence à Paris (là où Staunton avait détrôné Saint-Amant en 1843).
Adolf Anderssen, 1818-1879, Allemagne. Professeur de mathématiques de profession, joueur d’échecs par passion, Anderssen était un joueur d’échecs de l’école romantique, où l’attaque prime sur le matériel (Paul Morphy est un autre illustre représentant de cette école, "fondée" par l’Italien Greco).
Il est considéré comme étant le meilleur joueur du monde de 1851 à 1858. Anderssen dit avoir appris à jouer aux échecs grâce au livre de William Lewis, Fifty Games between Labourdonnais and McDonnell (1835), que lui avait offert son père.
Il fut également un problémiste reconnu, publiant dès 1842, Aufgaben für Schachspieler, une collection de 60 problèmes. Ce qui attira sur lui l’attention de la Pléiade berlinoise, nom donné à un groupe de sept champions d'échecs constitué à Berlin au milieu du XIXème siècle. (On leur doit notamment la défense berlinoise dans la partie espagnole).]
Staunton-Anderssen, ronde 3, Londres 1851. Position après 28…h5.
Les Blancs jouent 29.Cf6+ et les Noirs, ne voyant pas la menace de mat, jouent 29…Rf7.
Les Blancs concluent par : 30.De8# 1-0.
Le tournoi de Londres (1851)
Parties et résultats complets (en anglais)
https://www.chessgames.com/perl/chess.pl?tid=79453
Le jeu d’échecs Staunton
En 1849, Nathaniel Cooke (rédacteur en chef, The Illustrated London News) déposa un brevet pour le design de pièces d’échecs qu’il avait dessinées. Elles étaient compactes, bien équilibrées, et facilement identifiables. Howard Staunton en fit la promotion dans sa chronique dans le même journal (chronique d’échecs la plus lue au monde, à l’époque).
Les 500 premiers jeux (ébène et buis, ivoire) furent vendus dans un coffret signé par Staunton, contenant également un exemplaire de son traité d’échecs, The Chess-Player's Handbook.
Le modèle Staunton s’imposa rapidement dans le monde entier. Son design « néo-classique » victorien est inspiré de l’architecture de la Grèce Antique et de l’Empire romain - ex : forme des cavaliers inspiré par les chevaux du Parthénon (NDLR. - Les modèles antérieurs les plus courants -Barleycorn, Régence, St-George, modèle d’Europe centrale- étaient généralement de forme haute et étroite, se renversaient facilement au cours des parties. Leurs pièces se ressemblaient toutes, ce qui désavantageait un joueur peu familier du modèle utilisé par son adversaire).
Apprécié des amateurs comme des professionnels, le jeu d’échecs Staunton est le modèle recommandé par la FIDE pour les compétitions officielles d’échecs.
Pour en savoir plus : article – matériel du match S-Amant vs Staunton, Paris (blog : café de la régence – J.-O. Leconte)
La partie immortelle d’Anderssen
Si Saint-Amant fut absent du tournoi de Londres, un autre joueur du Café de la Régence, à Paris, était présent : Lionel Kieseritzky (éliminé lors de la première ronde par…Anderssen).
Lors d’une partie, en marge du tournoi qu’il venait de remporter, Anderssen, joueur romantique par excellence (NDLR. - l’attaque prime sur les considérations positionnelles – nous sommes à l’aube des échecs modernes), joua une partie remarquable contre Kieseritzky. C’est « La partie immortelle ».
Position finale après 23.Fe7#. Les Blancs ont sacrifié leur dame et leurs deux tours, pour mater les Noirs avec trois pièces mineures.
Pour en savoir plus : article – Kieseritzky (blog : café de la régence – J.-O.Leconte)
Un problème d’échecs d’Anderssen
Les Blancs jouent et font mat en 4 coups.
A.Anderssen, Aufgaben für Schachspieler (Gourmandises pour joueur d'échecs), 1842.
Solution : 1.Fh5 Rxh5 2.Rg7 h6 3.Rf6 Rh4 4.Rg6#
samedi 8 août 2020
La longue marche du roi
Par Oliver
Un plan original, surgi de nulle part, pour gagner de façon imparable…
En 1991, au tournoi Interpolis de Tilburg (Pays-Bas), Nigel Short (Angleterre) joue avec les Blancs contre Jan Timman (Pays-Bas) lors de la 4ème ronde. Timman opte pour une défense Alekhine (1.e4 Cf6), une ouverture plutôt rare au plus haut niveau.
Après l’ouverture vient le milieu de partie… Les Blancs dominent, mais la position est assez verrouillée… C’est alors que Nigel Short a l’idée d’utiliser son propre roi pour mener à bien une attaque de mat contre le roi adverse.
Le roi blanc va effectuer une marche jusque dans le camp adverse, au mépris du danger, et bien que les pièces lourdes (dames et tours) n’aient pas été échangées. (Habituellement, on laisse prudemment son roi à l’abri, jusqu’en finale, pour éviter les attaques pouvant mettre rapidement un terme à la partie).
La marche du roi de Short - une idée ingénieuse, née du génie humain, et qui de nos jours encore, peut rendre perplexes les machines lorsqu’on leur soumet la position à leur sagacité.
Nigel Short, GMI, né en 1965, Angleterre. Vice-président de la FIDE (Fédération Internationale Des Echecs.
« Le roi est une pièce offensive puissante. Utilisez-le ! »
Wilhelm Steinitz
Jan Timman, GMI, né en 1951, Pays-Bas.
Position après 30….h5. C’est alors que les Blancs (Nigel Short) ont l’idée de faire venir leur roi en dans le camp adverse, pour mater le roi noir. Ils jouent 31.Rh2.
Position finale après 34.Rg5 1-0. Les Noirs (Jan Timman) abandonnent : ils ne peuvent pas empêcher la dame blanche de les mater, assistée par son propre roi.
Voici une brève entrevue (en anglais) avec Nigel Short lors des Olympiades d'échecs en 2014 (Tromso - Norvège).
A partir de 2 minutes et 25 secondes il parle de cette partie :
"Je sais que lorsque je serai mort, sur ma pierre tombale, il y aura ma partie contre Jan Timman, Tilburg 1991" !
Résultats et parties du tournoi
15ème tournoi Interpolis (1991), Tilburg (Pays-Bas).
Un tournoi fermé avec 8 participants (matchs aller-retour pour chaque participant contre les 7 autres joueurs), remporté par G.Kasparov (10/14). Participants : Garry Kasparov (2770), Anatoli Karpov (2730), Evgeny Bareev (2680), Nigel Short (2660), Vishwanathan Anand (2650), Jan Timman (2630), Viktor Korchnoi (2610), Gata Kamsky (2595) vainqueur de l’édition précédente.
- https://www.chessgames.com/perl/chesscollection?cid=1012032
Un plan original, surgi de nulle part, pour gagner de façon imparable…
En 1991, au tournoi Interpolis de Tilburg (Pays-Bas), Nigel Short (Angleterre) joue avec les Blancs contre Jan Timman (Pays-Bas) lors de la 4ème ronde. Timman opte pour une défense Alekhine (1.e4 Cf6), une ouverture plutôt rare au plus haut niveau.
Après l’ouverture vient le milieu de partie… Les Blancs dominent, mais la position est assez verrouillée… C’est alors que Nigel Short a l’idée d’utiliser son propre roi pour mener à bien une attaque de mat contre le roi adverse.
Le roi blanc va effectuer une marche jusque dans le camp adverse, au mépris du danger, et bien que les pièces lourdes (dames et tours) n’aient pas été échangées. (Habituellement, on laisse prudemment son roi à l’abri, jusqu’en finale, pour éviter les attaques pouvant mettre rapidement un terme à la partie).
La marche du roi de Short - une idée ingénieuse, née du génie humain, et qui de nos jours encore, peut rendre perplexes les machines lorsqu’on leur soumet la position à leur sagacité.
« Le roi est une pièce offensive puissante. Utilisez-le ! »
Wilhelm Steinitz
Position après 30….h5. C’est alors que les Blancs (Nigel Short) ont l’idée de faire venir leur roi en dans le camp adverse, pour mater le roi noir. Ils jouent 31.Rh2.
Position finale après 34.Rg5 1-0. Les Noirs (Jan Timman) abandonnent : ils ne peuvent pas empêcher la dame blanche de les mater, assistée par son propre roi.
Voici une brève entrevue (en anglais) avec Nigel Short lors des Olympiades d'échecs en 2014 (Tromso - Norvège).
A partir de 2 minutes et 25 secondes il parle de cette partie :
"Je sais que lorsque je serai mort, sur ma pierre tombale, il y aura ma partie contre Jan Timman, Tilburg 1991" !
Résultats et parties du tournoi
Un tournoi fermé avec 8 participants (matchs aller-retour pour chaque participant contre les 7 autres joueurs), remporté par G.Kasparov (10/14). Participants : Garry Kasparov (2770), Anatoli Karpov (2730), Evgeny Bareev (2680), Nigel Short (2660), Vishwanathan Anand (2650), Jan Timman (2630), Viktor Korchnoi (2610), Gata Kamsky (2595) vainqueur de l’édition précédente.
- https://www.chessgames.com/perl/chesscollection?cid=1012032
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